Suite aux différents attentats qui ont frappé la France et dernièrement, celui de Nice, les gens s’affichent en résistants en continuant de faire comme si de rien n’était. Pourtant, avoir peur n’est pas une mauvaise chose. Et si nous ne changeons pas la façon dont nous vivons, alors ça continuera.
Je me suis fait une réflexion suite aux témoignages répétés des français, qu’on peut entendre ou lire sur les réseaux sociaux après chaque attentat. Ces témoignages, c’est que le français veut se tenir debout, montrer qu’il n’a pas peur, ou plutôt, qu’il n’a pas peur de la peur. Le français veut continuer à boire des bières en terrasse, à faire la fête, à se rendre à des manifestations. Bref, le français veut continuer à vivre comme si de rien n’était. Et pourtant…
La peur n’est pas une mauvaise chose
Et pourtant, la peur n’a rien d’une émotion lâche ou négative. À l’origine, c’est un sentiment que nous ressentons quand notre vie est en danger. La peur, c’est pour nous dire « attention, là tu risques de prendre des gadins dans la tronche ». Ignorer sa peur, c’est ignorer le danger et seul un inconscient ignorerait le danger. Prenons l’exemple de nos aïeux durant la seconde guerre mondiale. Parmi eux, certains étaient des membres de la résistance. Bien loin d’ignorer leur peur, celle-ci leur servait à minimiser les risques de se faire prendre quand il s’agissait d’aller faire la peau aux nazis. Pas fous donc, mais braves, courageux.
Toujours pour transposer notre situation à celle de la seconde guerre mondiale, l’attitude que certains français affichent aujourd’hui serait comparable à celle de Juifs qui, refusant l’occupation des nazis, iraient déambuler devant des SS pour montrer qu’ils n’ont pas peur. À l’arrivée, c’est écrit Dachau sur le panneau. Oh bien entendu, je ne dis pas qu’il faut céder à l’immobilisme de la peur, mais plutôt écouter celle-ci avec recul. Alors, oui, pour ma part je vais désormais éviter certains bains de foule tant que certaines mesures ne seront pas prises. Les événements de Nice sont une réponse à l’appel de Daesh aux actions isolées. Ainsi, n’importe quel détraqué peut utiliser un extrémisme pseudo-religieux pour justifier sa folie et emmener avec lui les autres dans sa chute. Tout ce qu’on y gagnera, c’est faire davantage de proches éplorés.
En vérité
Tout ce que souhaite Daesh, que nous bombions le torse par orgueil, que nous ne bougions pas par entêtement. Une cible est toujours plus difficile à atteindre quand elle est en mouvement ou qu’elle se fait discrète. Daesh ayant appelé aux actes isolés, ceux-ci doivent donc, en toute logique, être facilement réalisables pour que leur appel rencontre de nombreuses réponses. En bref, se tenir fièrement, c’est poser une cible sur sa tête.
L’attitude des français est, d’après moi, une dissonance cognitive en réponse à une vérité que les gens refusent d’admettre. Cette vérité, c’est que la France est en guerre. Certes, pas une guerre des tranchées. Je peux dormir tranquille, il y a peu de risques que je tombe au combat comme ce fut le cas d’un de mes arrière-arrière-grands-pères lors de la Bataille de la Somme. Mais c’est une guerre insidieuse, qui se cache dans le quotidien des gens. Une guerre comme le vivent les populations de Palestine, d’Irak ou d’Afghanistan, pour ne citer que ces pays là. Celle des attaques suicides, qui ne préviennent pas et font d’un jour ordinaire une hécatombe. Il est révolu le temps où la France faisait la guerre chez les autres. Ca se passe désormais chez nous. Bien sûr, il n’est jamais facile d’admettre un tel état de faits. Moi-même en écrivant ces lignes, poser ces mots fixe les idées dans ma tête et me prend au cœur : mon fils de quelques mois va grandir dans un pays en guerre. Mais c’est la stricte vérité. Et si à l’étranger on en parle pas, c’est parce que la vérité à admettre est tout aussi difficile : un pays d’Occident, qui plus est la France, est une zone de guerre.
Ne pas cesser de vivre
Pour autant, la vie continue ! Mais plutôt que de provoquer Daesh de façon imbécile, nous devons changer notre rapport au terrorisme et découvrir notre rapport à la guerre. Plutôt que de laisser la peur nous envahir pour nous immobiliser, elle doit servir d’appui à notre réflexion. Concrètement, qu’est-ce que ça veut dire ? Voici quelques propositions en vrac pour continuer à se retrouver ensemble, sans avoir à trop s’inquiéter :
- Organiser davantage les événements de masse dans des lieux clos ou avec un périmètre défini (avec des points d’accès et des clôtures temporaires) et entièrement sous contrôle.
- Les personnes ayant accès à ces événements doivent être strictement contrôlées.
- Donner plus de moyens humains et matériels aux forces de l’ordre à l’occasion de ces événements et pour enquêter sereinement.
La coupe de l’Euro 2016 est un bon exemple des mesures à adopter. Alors j’entends d’ici les amis s’élever contre ces mesures, mais je me permets de rappeler l’exposé du paragraphe précédent. Pour autant, je suis contre l’État d’urgence (tout du moins dans la façon dont il est appliqué aujourd’hui) et il ne s’agit là nullement d’appliquer un État d’urgence permanent. Des actes isolés de timbrés « roulant en solo » ne sont pas détectables par les mesures de l’État d’urgence. Il faut donc en terminer avec ce dernier, mais doter notre pays des moyens adaptés à la situation.
Alors oui, la botte ne pourra jamais être partout et en conséquence, il y aura sans doute quelques événements à passer à la trappe. Mais on a jamais vécu en temps de guerre comme on vit en periode de paix. Sauf qu’en paix, nous ne le sommes malheureusement plus.