Le libertarianisme, une opportunité pour le retour d’un Roi Catholique, partie 1

Par , Le 12 mars 2024 (Temps de lecture estimé : 10 min)

Et si une société libertarienne était l’opportunité pour le royalisme catholique de revenir sur le devant de la scène et prospérer comme jamais ? C’est la réflexion que je vous propose d’explorer au travers de cet article en deux parties.

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Tandis que notre monde tombe en désuétude, que les concepts traditionnels de gouvernance et d’économie sont remis en question et que les libertés individuelles reculent toujours plus, il est capital d’envisager d’autres modèles de société favorisant le développement des individus et respectueux de la liberté individuelle. Mais liberté individuelle ne veut pas dire ouvrir la porte à tout et n’importe quoi (coucou les wokes). Ainsi le modèle auquel je pense doit-il aussi permettre le retour aux valeurs conservatrices. En l’occurrence, je parle ici du royalisme au sein d’un système anarcho-capitaliste (que nous désignerons par le mot féminin « anarcapie » pour le reste de l’article).

Évidemment, si vous n’êtes pas familier de ces concepts, alors cet article risque de vous faire l’effet d’un cactus qu’on aurait confondu avec un godemichet. Afin d’éviter cela, vous pouvez commencer par lire cet article sur le royalisme, puis regarder cette série de vidéos au sujet du libertarianisme.

C’est bon pour vous ? Alors, allons-y Alonzo !

L’idée ici exprimée est celle d’un système où la liberté individuelle et le marché libre sont les maîtres mots, ce qui permet aux idées de s’exprimer, non seulement au titre de la liberté d’expression, mais aussi à celui de l’innovation, de l’entrepreneuriat tout comme au titre des méthodes de gouvernance. Parmi ces idées, celle du retour du Roi.

Disclaimer : il convient de différencier la royauté de la monarchie. Dans une royauté, le chef d’État est incarné dans la figure du roi. La monarchie, quant à elle, est un régime politique dans lequel tous les pouvoirs sont concentrés en une seule personne. Si royauté rime souvent avec monarchie, l’inverse n’est pas vrai. Par exemple, nous pouvons considérer que la Vème République est implicitement une monarchie présidentielle. Ici nous parlerons de royalisme et non de royauté. C’est-à-dire qu’il s’agit de plébiscité la figure du Roi, un Roi Catholique de droit divin dans le cas présent – c’est-à-dire désigné par Dieu. Mais ce Roi n’est pas un chef d’État, comme nous le verrons plus loin. Il ne s’agit donc pas de se servir du libertarianisme comme prétexte pour réinstaller un Etat fort. Les âmes sensibles peuvent donc lâcher leur boîte de valium un instant et poursuivre leur lecture. 

D’aucuns diraient que royalisme et libertarianisme ne sont pas compatibles. Que nenni ! D’autres encore, tomberaient rapidement dans les clichés révolutionnaires et protestants. Or, il faut savoir que les gens avaient bien plus de libertés sous l’Ancien Régime qu’aujourd’hui. Et oui, car le rôle d’un Roi Catholique n’est pas de légiférer en permanence la vie des gens, mais à protéger et guider le peuple qui le suit.

Malheureusement l’État, même s’il est une royauté et encore plus s’il est républicain, appelle à toujours plus d’État et d’ingérence dans la vie des gens. C’est inéluctable et démontré par la loi économique dite de Bitur-Camenber (ou loi de destruction totale). Inutile de vous la résumer, un rapide tour sur le lien précédemment indiqué ne pourra que vous convaincre que du fait que l’État est synonyme de coercition, de taxe et de vol.

Ce qui m’amène à la question suivante : après tant de siècles de déceptions, de désillusions, de mensonges, de tromperies, comment peut-on encore être en faveur du concept l’État ?

Mais comme vous le savez normalement à ce stade (si vous avez lu les liens plus haut – Jean-Etienne natio au fond, je te vois), anarcapie ne veut pas dire absence de règle. C’est là qu’un Roi Catholique pourrait alors trouver sa place et revenir en force, car l’anarcapie vient justement poser le cadre pour que cela soit possible.

Ce roi moderne serait alors un entrepreneur, un visionnaire dont la mission serait de guider, de protéger et de prospérer au sein d’un marché libre. De prime abord, comme je l’ai écrit au début de l’article, on pourrait penser que royalisme et anarcapie sont antagonistes, car la posture du Roi suggère l’idée d’un État a minima régalien. Mais comment fixe-t-on les limites du régalien ? On ne les fixe pas, c’est proprement impossible puisque chacun en aura une vision différente. Chaque concession serait alors une atteinte au droit naturel du principe de non-agression (on va y revenir).

Enraciné dans la défense des valeurs de la civilisation chrétienne tout en respectant le libre arbitre des individus, ce modèle pose alors la question suivante : comment un roi, opérant dans un système anarcho-capitaliste, peut-il non seulement exister, mais aussi prospérer, offrant ainsi une alternative viable et éthique à la gouvernance contemporaine ? Cet article se propose d’explorer cette thèse, en examinant les rôles, responsabilités, et impacts d’un tel système de gouvernance dans le contexte d’un monde libre et décentralisé. Et pour ça, une solution s’impose d’elle-même, il s’agit du néo-féodalisme de droit privé, un concept qui a été formalisé par l’ami Adam Villon (que les plus assidus d’entre-vous commencent à bien connaître).

Le dénominateur commun entre catholicisme et libertarianisme

Avant de poursuivre, il convient de revenir sur les fondamentaux du libertarianisme : le droit naturel. Accessible par la raison, celui-ci est également ancré dans la foi chrétienne. Mais concrètement, de quoi s’agit-il ? se demanderont les néophytes. Et bien nous y venons.

En philosophie ou bien chez les auteurs catholiques, le droit naturel est plus connu sous le petit nom latin de jus naturale. J’avais d’ailleurs déjà fait un article le concernant et traitant plus particulièrement du problème que pose le concept de contrat social. Le droit naturel se définit par le fait qu’il est accessible par la raison et nous renvoie au fonctionnement naturel des individus. Dans le libertarianisme, on retiendra ces trois aspects :

  • La propriété privée : c’est-à-dire, la reconnaissance mutuelle d’à qui appartient quoi
  • La liberté individuelle : c’est le droit de faire ce qu’on désire de sa propriété, et ce droit se négocie entre les individus.
  • Le principe de non-agression : ce droit part du principe que chaque individu a le droit de vivre et de conserver sa vie, ainsi que sa propriété. Cela implique que nul ne peut légitimement agresser autrui – sauf légitime défense – ni sa propriété.

La particularité du droit naturel est qu’il est d’une part accessible par la raison humaine, et d’autre part qu’il nous est donné par Dieu au travers de l’Église catholique. Pie XI, en 1937, nous dira d’ailleurs au travers d’une encyclique que « le droit naturel est un rempart contre les régimes totalitaires ».

Le catholique l’aura compris, le libre arbitre voulu par Dieu pour les Hommes (encyclique Libertas Præstantissimum, Léon XIII, 1888) s’inscrit alors naturellement dans le droit naturel. Là encore, je te renvoie vers l’article que j’avais écrit au sujet du pardon qui renvoie fondamentalement au concept de libre arbitre. Reconnaître le libre arbitre de l’autre, c’est lui reconnaître sa dignité humaine, d’un point de vue catholique, à être un individu responsable de ses actes, mais aussi en capacité de changer. Ces deux principes sont intrinsèques : le libre arbitre n’enferme pas l’individu dans sa faute ou dans les travers et le renvoie à sa responsabilité individuelle (en l’occurrence de bien agir ou, le cas échéant, de réparer et de changer).

Le concept de libre arbitre ainsi posé remet d’ailleurs en question l’attitude que certaines institutions chrétiennes et certains rois ont pu avoir à l’égard des populations, il faut être honnête.

Introduction à l’anarcho-capitalisme et au royalisme

L’anarcho-capitalisme met en avant la primauté de la propriété privée et du marché libre. Il est souvent vu comme un terreau fertile pour l’innovation et l’entrepreneuriat. Cependant, il est moins courant d’associer cette philosophie avec l’idée d’un Roi, prospère, qui plus est. Pourtant, l’intégration du Roi dans un système anarcap pourrait non seulement être compatible, mais aussi bénéfique, en particulier lorsque ce système est guidé par les valeurs chrétiennes.

Selon Hans-Hermann Hoppe, la paix sociale et la résolution des conflits dans un système anarcap dépendent de la reconnaissance et du respect du droit naturel. La propriété privée, l’un des piliers du droit naturel, se définit par le principe du premier occupant et du transfert volontaire et pacifique de propriété​​. Cette approche souligne l’importance de l’autonomie individuelle et de la responsabilité individuelle, qui sont aussi des piliers d’une société anarcap.

Dans un tel cadre, le rôle du roi s’inscrit différemment par rapport à la conception traditionnelle de la monarchie. Au lieu d’être un chef d’État comme on l’entend aujourd’hui, le roi devient un entrepreneur, un gestionnaire de biens et de services au sein de la société. Ce « roi-entrepreneur » serait responsable de la gestion de ses terres et de ses ressources, en adhérant aux principes du marché libre et en respectant les droits de propriété individuelle. En tant que tel, il pourrait alors offrir à d’autres territoires des services régaliens – défense, justice, infrastructure, etc. – non pas comme des (faux) droits acquis par la naissance ou la force, mais en tant que services contractuels à destination des territoires qui choisiraient librement de s’inféoder, c’est à dire de le suivre. Il le ferait toutefois en devant concurrencer d’autres acteurs du marché.

De plus, enraciné dans la défense de la civilisation chrétienne, ce roi-entrepreneur pourrait incarner une force morale et éthique dans la société. Ainsi, il demeure un leader. Ce n’est donc pas la force économique qui légitimerait sa position, mais son adhésion aux principes chrétiens de justice, de charité et de service envers la communauté. Ces valeurs pourraient guider la manière dont il gère ses entreprises et la façon dont il interagit avec ses sujets, créant ainsi un modèle de leadership qui est à la fois éthique et efficace.

En résumé, l’intégration d’une royauté dans un système anarcap basé sur le néo-féodalisme de droit privé offre une perspective intéressante. Cela permet de combiner les avantages d’un marché libre et d’une propriété privée clairement définie avec une forme de leadership qui valorise et protège les traditions et les valeurs chrétiennes. Le but d’un roi de droit divin étant la défense desdites valeurs, le roi aurait alors l’obligation implicite de faire tout ce qui est en son pouvoir pour être le meilleur acteur dans les différents domaines, afin de conserver ses vassaux et ainsi de remplir l’objectif d’unité qui est le sien. Les vassaux, quant à eux, seraient des gouverneurs à la tête de plus petits territoires et ayant un fonctionnement similaire et à une échelle beaucoup plus petite. Un tel modèle présente un potentiel intéressant pour repenser la gouvernance et la structure sociale dans le monde contemporain.

Ca ne s’arrête (évidemment) pas là

Maintenant que les bases sont posées, il convient alors de détailler le rôle et les fonctions de ce roi-entrepreneur et des mécanismes de gouvernances à l’œuvre pour que ce système s’inscrive parfaitement dans le droit naturel. A cet effet, je vous invite donc à présent à lire la seconde partie de cet article sur le site de Re:Possession, en cliquant ici.

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René DROUIN

Auteur d'anticipation, blogueur et créatif touche-à-tout, catho tradi, entrepreneur, THPI. Chasseur de woke et de droitard formolé à mes heures perdues. Membre de Re:Possession. Mi-ours, mi-panda et re-mi-ours derrière.

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